Deknudt (à propos de Sans-titre, 2024)
Deknudt continua de compter les jours. Le temps était gris et lourd, comme chargé de plomb. La galerie était vide, personne ne s’y aventurait. Quant à Deknudt, maintenant que son regard pouvait balayer la pièce sans un chat pour courir après, il se dit qu’il allait regarder ailleurs. À force d’analyser les oeuvres qui l’entouraient dans ce white cube, il voulait s’en enfuir, de peur que son analyse ne devienne indigeste et qu’il ait un haut-le-coeur à refaire face à ses congénères.
Alors, il chercha un petit digestif vers un encadrement lumineux qui, plus tôt, révélait un oiseau chantant, mais qui, maintenant, était obstrué. La fenêtre était-elle en train de fondre ? La pluie formait comme un rideau dont les perles d’eau claire semblaient se lancer dans une folle course-poursuite. Deknudt voulait deviner qui serait la gagnante de cette cascade, laquelle atteindrait la première l’encadrement de sa cellule.
Seulement, le temps se figea pour Deknudt : la pluie ne tombait pas. Deknudt maintenait son regard, cherchant le moindre mouvement. C’est alors qu’une lueur de soleil fit briller le toit après un long moment de face-à-face qu’il comprit. Il était face à une oeuvre, mais ce n’était pas un tableau ni une peinture. Il avait l’impression de voir un paysage dansant. Il était face à une oeuvre qui avait arrêté le temps.
Deknudt était heureux d’avoir posé son regard ailleurs que sur les murs de la galerie, il était même satisfait de s’être pris au piège. Il était là, à observer, comme s’il attendait que les perles se déversent à nouveau.
Constance Deharo